Je suis navré de devoir dire cela, mais je le dis aussi en tant qu’ancien Aumônier des prisons, et sans juger ou chercher à nuire à l’individu concerné : l’Abbé Pierre était un grand délinquant sexuel, un abuseur pervers, voilà les appellations minimum et basiques qu’il nous faut utiliser.
Le Pape parle de lui comme « d’un grand pécheur », mais c’est insuffisant, il aurait dû évoquer d’abord que l’Abbé Pierre était « un grand délinquant et abuseur sexuel pervers », par respect envers les victimes détruites. Chaque mot compte et peut devenir un élément reconstructeur.
Le Pape aurait dû aussi immédiatement demander pardon aux victimes, en tant que représentant ultime de la prolongation de l’Église-institution que servait l’Abbé Pierre. Il aurait dû aussi dénoncer la lâcheté des supérieurs hiérarchiques de l’époque, qui ont couvert l’Abbé au lieu de le livrer à la justice, qui l’aurait incarcéré, en ordonnant une injonction de soins.
Les supérieurs, en se taisant, sont devenus lâches, et ont permis à l’Abbé d’attaquer encore et encore, des dizaines de nouvelles victimes, dont des mineures. Ils ont en quelque sorte, encouragé ses méfaits. Qui ne dit mot consent.
Nous ne renions en rien tout le bien phénoménal et extraordinaire que l’Abbé Pierre a fait en son nom et au nom de Dieu au travers de son ministère remarquable auprès des sans-logis. Nous n’y toucherons jamais. Bravo à lui et à son courage.
Mais nous renions tout le mal qu’il a fait au nom de sa propre perversité, et de sa soumission à des passions sexuelles viles, au moment où il se jetait sur ses victimes. Passions qui étaient parfois préméditées et calculées lorsqu’il les attirait dans un appartement parisien.
Je suis contre la règle du célibat forcé des prêtres, que j’estime être en soi un immense abus psychologique, spirituel et sexuel. Car à l’âge de leur ordination, les séminaristes ne connaissent pas tous leurs penchants et besoins sexuels réels, et ne sont pas aptes à discerner s’ils doivent se marier ou non. Ils n’ont pas la maturité sexuelle requise. Et c’est à cette période de leur vie qu’on leur demande de castrer leur vie sexuelle.
Le célibat forcé des prêtres n’existait pas durant les premiers siècles de l’histoire de l’Église Catholique. À partir de Léon IX (1049-1054), les papes ont entrepris un grand mouvement de réforme, qui prendra le nom de « réforme grégorienne » et qui se poursuivra même après le pontificat de Grégoire VII (1073-1085). Par un décret de 1074 du pape Grégoire VII, le mariage et le concubinage des prêtres deviennent interdits.
L’Apôtre Paul écrivait ceci à l’époque néo-testamentaire : (1 Corinthiens 7 : 2) « Toutefois, pour éviter l’impudicité, que chacun ait sa femme, et que chaque femme ait son mari. 3 Que le mari rende à sa femme ce qu’il lui doit, et que la femme agisse de même envers son mari.… » (5) « Ne vous privez point l’un de l’autre, si ce n’est d’un commun accord pour un temps, afin de vaquer à la prière ; puis retournez ensemble, de peur que Satan ne vous tente par votre incontinence.… »
Le non-respect des normes bibliques par la hiérarchie catholique a fait chuter durant des siècles, de très nombreux prêtres dans des abus ou viols sexuels envers des femmes, dans la pédophilie, dans l’éphèbophilie (attirance envers les jeunes adolescents mineurs pubères), et dans de nombreuses autres déviances sexuelles. J’estime que c’est une responsabilité très grave.
Nous, les pasteurs protestants, sommes mariés, ce qui nous protège grandement – dans la majorité des cas – d’éventuelles dérives sexuelles.
J’espère que l’Église Catholique dont certains chrétiens me sont chers, aura le courage de reconnaître ses torts au plus haut sommet, et de changer des lois qui en soi, sont tacitement porteuses de perversité et de provocation ou encouragement à la débauche sexuelle, sur le terrain.
Certain(e)s me trouveront dur, mais il faudra bien qu’un jour ou l’autre, la grande entreprise catholique se remette en question et change, afin de protéger les milliers de victimes qu’elle suscite par son clergé, non sans l’ignorer, et dans tous les pays du monde.
J’ai beaucoup exercé mon ministère en Afrique, et il est de notoriété publique que les prêtres ont une « bonne amie » en secret, le Vatican le sait.
Il y a des lois religieuses que j’estime être devenues de plus en plus criminelles, et surtout au vu de l’hyper-sexualisation de notre société contemporaine, et du développement brutal et incessant de la pornographie dans toutes les chaumières, et donc aussi dans les presbytères.
Quel est le prochain pape qui aura le courage de provoquer de nouvelles réformes à ce sujet ? Que Dieu l’encourage à le faire. Que tout aveuglement cesse.
Et que les désordres graves actuels s’amenuisent jusqu’à devenir des cas rares.
Pasteur Philippe Auzenet, Ancien Aumônier des Prisons – Président de l’Association OSER EN PARLER ( oserenparler.info ) qui exerce un ministère au milieu des dépendants sexuels