Cet article est un extrait du livre de Philippe Auzenet : « Surmonter l’épreuve ». On peut se le procurer dans la rubrique « Livres »
LE TERREAU DE L’EPREUVE : MA VIE INTERIEURE
« Ce sont les épreuves qui nous révèlent. Elles nous mettent au défi de nous dépasser et de nous voir dans notre propre réalité. »
Tous, que nous le voulions ou non, nous traversons un jour la tempête de l’épreuve. A tout âge, quelle que soit notre race ou notre culture, quelles que soient nos croyances, l’épreuve survient à cause d’une crise, d’un conflit, d’une opposition, d’une maladie, d’un traumatisme, d’un chagrin qui éprouve alors notre parcours de vie, notre courage, notre résistance, notre constance.
Soudain, l’épreuve casse notre rythme de vie, et nous place face à notre pauvreté intérieure, notre faiblesse, notre incapacité à réagir. Elle nous montre nos limites en nous projetant parfois seul à terre, sans force. Et nous n’avons alors aucune idée du moyen par lequel nous allons nous en sortir : l’impasse est là, devant nous, bien fermée, et barricadée.
Après une période où nous restons comme assommés, nous commençons à réfléchir, pour essayer d’identifier puis de surmonter l’obstacle, ou de le contourner ; au pire nous décidons de fuir car nous n’aimons pas affronter les événements qui bousculent notre rythme de vie et notre philosophie. En ce sens, l’épreuve nous teste, elle teste notre profondeur de vie, notre détermination, notre assurance. Elle dévoile nos vraies motivations, et nos aptitudes cachées. Les épreuves de la vie nous dévoilent à nous-mêmes et nous incitent à souvent mieux nous connaître et nous dépasser : nous découvrons alors ce que nous sommes réellement, mais aussi ce que nous ne sommes pas.
Une remarque s’impose : le mot « crise » vient du grec crisis, qui signifie choix. Cela veut donc dire que toutes les crises, qu’elles soient individuelles ou sociales, sont des occasions de faire des choix. En chinois, le mot crise utilise un idéogramme composé de deux éléments : l’un signifie danger et l’autre veut dire opportunité. Selon ces critères, une crise doit donc être vécue comme un danger qui nous place devant l’opportunité de faire un choix.
Avant de détailler les différentes sortes d’épreuves et de crises qui parsèment notre route humaine – et elles sont nombreuses – j’aimerais d’abord évoquer le terreau dans lequel l’épreuve s’implante, se manifeste et grandit. Ce terreau, c’est celui de notre personnalité, de notre vie intérieure, de notre cœur, et de notre vécu réel. Ce terreau peut parfois représenter en lui-même un mauvais réceptacle pour l’épreuve, et la démultiplier.
Il est important de parler de l’épreuve, mais il est encore plus important de parler d’abord de « l’éprouvé », et des circonstances de l’épreuve. C’est ce que nous ferons ensemble dans cette première partie.
« L’homme mûr n’en voudra jamais à la vie, car à travers son non-sens extrême, il y découvre un sens plus profond. Il accepte avec le sourire ce qui le contrarie, et la fermeté de son âme lui donne la force de transformer l’existence, grâce à l’expérience de l’Etre. » (K. Graf Durckheim)
I. LE SENS DE MA VIE
« Le bonheur, c’est d’être présent à soi-même et aux autres, et de partager »
Faire ou être
L’épreuve, quelle qu’elle soit, est comme un avion qui atterrit brutalement sur une piste d’aéroport, et sans crier gare : si celle-ci est en mauvais état, les risques d’accident sont accrus. En ce sens, le bon entretien de la piste est primordial. Cette piste représente ici les flancs de ma vie intérieure.
Je suis si surpris de constater parfois la superficialité dans laquelle vivent certaines personnes pourtant bien en vue et très adulées : elles mènent une vie à 180 à l’heure, mais sans jamais prendre le temps de s’arrêter et de méditer sur elles-mêmes et sur leur vécu. Elles fuient l’essentiel : l’être. Elles font, certes, mais ne sont pas réellement : elles paraissent. Sans en avoir pris conscience, elles sont vraiment en danger.
Nous n’avons pas tous eu le bon réflexe de réfléchir au sens de notre vie sur la terre, et au but profond que nous désirions poursuivre. Le vécu scolaire, professionnel, familial n’est pas tout. Avoir un bon diplôme, puis exercer un bon métier et gagner de l’argent, fonder une famille, c’est fondamental, mais ce n’est pas indispensable à une vie réussie.
Que nous le voulions ou non, nous serons un jour confrontés d’une manière intime et très personnelle, à certaines questions fondamentales de notre existence, celles qui sont reliées à la profondeur de notre être : notre identité réelle, notre idéal, notre vécu intérieur, notre foi en Dieu, et notre approche de la mort. Quel accueil réservons-nous à ce questionnement sur nous-même ? J’aimerais souligner ici combien cette réflexion est nécessaire, et même indispensable, et si possible avant que l’épreuve n’arrive.
Qui suis-je ? Qui m’a créé ? Où vais-je réellement ? Ma vie a-t-elle un sens ? Qu’est-ce que la réussite ? L’argent est-il un but ou un moyen ? La mort est-elle une fin en soi ou un recommencement ? Qu’est-ce que l’âme, qu’est-ce que le bien et le mal ? Dieu existe-t-il vraiment, et veut-Il communiquer avec moi ? Quelle est l’importance de l’amour ?
Sans nous relâcher, nous devrions nous attarder sur ces questions et aller jusqu’au bout de notre recherche, même si celle-ci doit durer plusieurs années. Car, qu’est-ce que ce délai par rapport à la durée de toute une vie ?
« En effet, lequel d’entre vous, s’il veut construire une tour, ne s’assied pas d’abord pour calculer la dépense et voir s’il a de quoi la terminer, de peur qu’après avoir posé les fondations, il ne soit pas capable d’achever, et que tous ceux qui le verront ne se moquent et ne disent : « Cet homme a commencé à construire, et il n’a pas été capable d’achever. » (Jésus, dans l’Evangile de Luc 14 : 28 à 30)
Ne nous réfugions pas d’abord dans le faire, mais dans l’être. Affrontons la question du sens réel de notre vie, cherchons à la cerner et à l’approfondir. Alors, après mûre réflexion, nous pourrons beaucoup mieux vivre le présent, puis nous fixer des objectifs bien définis pour l’avenir.
Si nous refusons, négligeons ou oublions de le faire, ne nous étonnons pas alors de devoir baisser trop facilement les bras et verser dans l’inconsistance et la confusion dès que la difficulté survient. Notre terrain n’est pas bien préparé : un jardinier dirait que nous n’avons pas réellement travaillé la terre avant de l’ensemencer.
C’est peut-être que notre décision de nous accrocher à la vraie vie n’est pas profonde, nos motivations ne le sont pas non plus, intérieurement nous ne sommes pas convaincus de faire des efforts pour trouver le bon chemin et y marcher. Nous préférons courir aveuglément, ou à l’inverse laisser tout aller, par peur d’un engagement. Notre vie est en perpétuel flottement, comme cet objet qui vogue à la surface de l’eau, et suit le courant parfois rapide, parfois très lent de la rivière. Nous ne vivons pas : nous survivons, en nous cachant inconsciemment derrière la façade de celui qui va toujours bien.
Certaines personnes se fixent exclusivement sur ce qu’elles ont été et s’y accrochent de toutes leurs forces comme à leur identité définitive ; d’autres se fixent uniquement sur ce qu’elles voudraient devenir, et restent donc en perpétuelle attente de leur identité. Leur problème est peut-être qu’elles resteront toute leur vie « des êtres ayant été » ou « n’ayant pas encore été mais qui seront ».
La vérité est que nous ne devons pas d’abord dépendre de notre passé, ou de notre avenir, mais essayer d’être, au présent : pour cela il nous faut d’abord progresser dans la découverte de notre véritable identité, et faire l’effort de l’intégrer en nous, sans l’ignorer, la dénier, la repousser et la fuir, au profit des reflets du passé ou de l’ombre du futur.
Qui suis-je ?
« Le plus grand des dénuements, la plus grande des pauvretés, c’est de n’exister pour personne » (Mère Térésa)
« La santé mentale est fondée sur un certain degré de tension entre ce que nous avons déjà réalisé et ce qui nous reste à réaliser, ou sur la différence entre ce qu’on est et ce qu’on devrait être » (Viktor E. Frankl)
Qui suis-je ? La perception de mon identité peut passer par mon nom de famille, la notoriété de mes ancêtres, ma culture, ma famille elle-même, mon milieu professionnel, mon handicap, mon passé ou mon avenir, ou d’abord par mon être intérieur.
– « Je suis comme les autres disent que je suis » : dans ce cas ma perception de moi-même passe d’abord par les autres. Si les autres me renvoient une image positive, je suis bien dans ma peau. Si c’est l’inverse, je suis mal dans ma peau. Mon identité est un reflet.
– « Je suis une apparence » : ma perception de moi-même est flottante, je ne sais qui je suis, je vis dans la confusion. Mon identité est égale à mon absence d’identité. J’ai plusieurs personnages en moi. Plus mon identité flotte, plus je suis.
– « Je suis comme mon corps » : ma perception de moi-même est d’abord physique. Si mon corps est difforme, ou manque de beauté, je me percevrai et considérerai comme mon corps, je me haïrai et resterai complexé. Si la perception de mon corps est positive, j’aurai une bonne image de moi-même, et ce, jusqu’au jour où les rides et les kilos apparaîtront… C’est en fait le parcours de vie des mannequins, des athlètes, de certains chanteurs. C’est aussi une obsession chez certaines jeunes femmes qui montent plusieurs fois par jour sur la balance, pour surveiller le gramme ou le kilo perdu ou retrouvé… Plus je suis beau aux yeux des autres et aux miens, plus je suis. Plus je suis laid à mes yeux et aux yeux des autres, moins j’existe.
– « Je suis comme mon intellect » : ma perception de moi-même est d’abord reliée à mes facultés d’intelligence, à l’ensemble de mes fonctions mentales ayant pour objet la connaissance et la réflexion. Plus je connais, plus je suis doué d’intelligence, plus je suis. Moins je connais, moins je brille par mon intelligence, moins j’existe.
– « Je suis comme mes émotions » : ma perception de moi-même est reliée au développement de mes émotions, à ma disposition à être facilement ému, touché par mon être et mes actes, ou ceux des autres. Plus je ressens positivement et vibre, plus je suis. Moins je ressens positivement, moins j’existe.
– « Je suis un battant », une personne combative et énergique : ma perception de moi-même est reliée à ma capacité de puissance, à la faculté de me déterminer à certains actes forts et de les accomplir. Plus j’ai d’énergie, plus je suis. Moins j’ai d’énergie, moins je suis.
– « Je suis comme mon caractère » : sanguin, colérique, passionné, ou rêveur, apathique… Ma perception de moi-même est reliée à mon caractère. Je suis comme mon caractère. Moins je développe mon caractère, moins j’existe.
– « Je suis ce que j’étais » : j’ai un palmarès, des médailles, des coupes, des diplômes, ou à l’inverse je n’ai rien, si ce ne sont que mes échecs. Ma perception de moi-même transite exclusivement par mon passé. Je suis bien parce que j’ai été quelqu’un de bien. Si je n’ai pas été quelqu’un de bien, je ne suis rien.
– « Je suis ce que je serai » : je n’ai pas vraiment le sentiment d’exister, je suis un être en devenir. Je suis donc mal à l’aise, ou au contraire imbu de moi-même. Je suis parce que je serai. Si mon avenir est fermé, je ne suis plus rien du tout.
– « Je suis un être supérieur » : mon identité passe par un sentiment de supériorité. Si je performe toujours, je suis. Si je ne suis pas le meilleur, je ne suis rien.
– « Je suis Elvis Presley ». Mon identité est celle de la personne que j’admire le plus : une vedette, une actrice, un personnage politique. Je fais tout pour lui ressembler, et dans le détail. Je suis un autre, un clone, une copie conforme. Je ne suis pas vraiment, je fais vivre un autre en moi.
– « Je suis quelqu’un de bien » : je sais que j’ai de la valeur malgré mes imperfections, j’ai une bonne image de moi-même. Je suis. Si j’expérimente des épreuves, je combats parce que je suis (et non pas pour être).
– « Je ne suis pas vraiment quelqu’un de bien » : je ne pense pas être grand-chose. Si je performe, je perds tous mes moyens. Si je vis dans l’échec, je panique.
– « Je suis un raté » : je ne pourrai jamais rien réussir, les autres me le confirment sans cesse. Plus je rate ma vie, plus je suis. Moins je rate ma vie, plus je suis en danger (d’être).
– « Je suis un déchet » : je n’aurais pas dû naître, je suis une erreur. Plus je m’enfonce dans le néant et la destruction, plus je suis. Plus je vis, moins j’existe.
– « Je suis un artiste, un inventeur », un être doué de facultés créatrices. Mon identité est reliée à mes capacités créatrices. Je crée, donc j’existe. Si je ne crée pas, je n’existe pas.
– « Je suis un professionnel » : médecin, avocat, ouvrier, professeur, géomètre, convoyeur, boulanger… C’est mon métier qui me transmet mon identité. Plus je réussis professionnellement, plus je suis. Moins je réussis, moins je suis.
– « Je suis un spirituel » : ma perception de moi-même est reliée uniquement à ma croyance spirituelle, à ma foi, à ma religion, je ne vis que par cela. Plus je suis spirituel, plus je suis. Moins je suis spirituel, moins j’existe.
– « Je suis un homosexuel, un hétérosexuel » : ma perception de moi-même passe d’abord par ma sexualité. Je m’identifie exclusivement à elle. Si je suis épanoui dans ma sexualité, je suis. Si je ne suis pas épanoui dans ma sexualité, je ne suis pas.
– « Je suis un sensuel ». Ma perception de moi-même passe par mes prouesses sentimentales et sexuelles. Si je ne suis plus performant à ce niveau, je n’existe plus à mes yeux. Mon image de moi-même reste alors pauvre et diminuée. Si je couche, je suis. Si je ne couche pas, je ne suis pas.
Dans la plupart de ces exemples de perception de mon identité, j’aurai besoin d’un rééquilibrage, car je me perçois imparfaitement. J’aurai besoin d’apprendre à mieux me connaître, en tant que créature appelée à l’équilibre et à la plénitude de mon être tout entier : corps, âme, esprit.
Mes besoins fondamentaux
Abraham Maslow, psychologue américain (1916-1972), a détaillé les besoins fondamentaux de l’être humain. Pour lui, la base sans laquelle l’homme ne peut commencer à s’épanouir est constituée par les besoins propres au fonctionnement de base de l’organisme humain, les besoins physiologiques : nourriture, chaleur suffisante, sexualité, sommeil, respiration. Puis viennent ensuite plusieurs autres besoins, qui tendent vers la réalisation du moi :
– Les besoins de protection et de sécurité (protection physique et psychologique des dangers, stabilité familiale et professionnelle, avoir des choses et des lieux à soi – délivrance de la douleur)
– Les besoins d’amour, d’appartenance et de relation (être accepté tel que l’on est, avoir une bonne réputation, recevoir et donner amour et tendresse, avoir des amis et un réseau de communication satisfaisant)
– Les besoins d’estime de soi (sentiment d’être utile, d’avoir de la compétence et de la valeur, point de départ de l’acceptation de soi et du développement de l’indépendance), de respect et de reconnaissance
– Les besoins de se réaliser et de s’accomplir (accroître ses connaissances, développer ses valeurs, croître et devenir mature, repousser ses propres limites, « faire du neuf », créer de la beauté, avoir une vie intérieure, une vie spirituelle)
Si les besoins physiologiques ne sont pas satisfaits, alors les autres besoins ne peuvent l’être non plus. Mais il en est ainsi de tous les paliers que nous découvrons dans le schéma ci-dessous : un palier non réalisé entraînera la non résolution des autres. Un palier fissuré entraînera la fissure des autres. Le palier qui s’écroule suite à une lourde épreuve entraînera l’écroulement des autres paliers. Il n’est alors pas étonnant que l’on utilise cette expression populaire : « Incroyable, lui qui était un battant et allait si bien, je l’ai ramassé à la petite cuillère… ».
Maslow, dans sa pyramide, montre une vision juste des besoins de l’être humain. Nous pourrions aussi les résumer ainsi :
3 : Besoins spirituels
2 : Besoins psychologiques
1 : Besoins physiques
L’Armée du Salut, qui de nos jours encore prend soin des sans domicile fixe, a une devise claire qui rejoint la pensée de Maslow : « S. S .S. » : « soupe – savon – salut » : on ne peut parler de l’Amour de Dieu à un homme qui grelotte, n’est pas lavé, dort sous les ponts et n’a pas mangé depuis longtemps. Il faut d’abord combler ses besoins physiologiques.
La pyramide de Maslow nous fait comprendre que lorsque l’épreuve arrive, elle secoue notre être de toutes ses forces, nous atteint souvent dans nos besoins fondamentaux, et provoque une déstabilisation douloureuse qui nous touche dans nos trois dimensions : physique, psychologique, spirituelle.
Plusieurs étages de la pyramide s’écroulent alors brusquement. Rien d’étonnant à ce que la douleur prenne toute la place. Mais comment, au fond de nous-même, allons-nous réagir ? De notre réaction dépendra l’émergence de solutions concrètes.
Prendre ou donner
Certains êtres parmi nous aiment les solutions de facilité, une vie hédoniste[1] où ce qui compte le plus, c’est le plaisir : plaisir de paraître, plaisir de jouir et de sentir, plaisir de posséder, plaisir d’être servi, plaisir de réussir. Leur vie se résume ainsi : profiter et amasser du plaisir.
L’homme doit conserver sa capacité de s’aimer lui-même, cela est nécessaire pour son épanouissement, car s’il se hait il ne peut aimer les autres. Cependant Dieu ne l’a pas créé pour qu’il devienne égoïste et tourné exclusivement vers lui-même, mais pour qu’il soit ouvert aux autres et s’intéresse à eux. Qu’il se donne à eux, et pour eux. Il est un être social capable de se donner et d’aimer.
L’épreuve renverse souvent les êtres hédonistes. Leur philosophie est brutalement anéantie par l’irruption de la souffrance : tout un empire, basé uniquement sur la religion du plaisir, s’écroule alors. « On n’est jamais heureux tout seul », dit le dicton. C’est vrai, le bonheur, c’est aussi la recherche de celui des autres, et ce n’est pas d’abord prendre mais donner. Se dépouiller, afin de revêtir nos semblables, à l’image de l’acte célèbre de St Martin, qui deviendra plus tard l’évêque de Tours : par un hiver de grand froid, alors qu’il était soldat et avait 18 ans, il vit un pauvre qui mourrait de froid, et n’ayant plus d’argent à lui donner, il prit son épée, partagea son manteau en deux, lui en donnant une moitié pour se réchauffer.
Une petite histoire chinoise illustre aussi cela : un mandarin partit un jour pour l’au-delà, et arriva d’abord en enfer. Lors de sa visite, notre homme remarqua que les baguettes de ceux qui mangeaient leur bol de riz faisaient deux mètres de long, et ils n’arrivaient pas à se nourrir ! Ils étaient tous attablés autour de leurs portions de riz, mais faisaient si triste mine et étaient si maigres.
Quelque peu troublé, notre homme décida d’aller voir ce qui se passait au Ciel. Tous étaient attablés aussi autour d’une table garnie de plats de riz, les baguettes faisaient aussi deux mètres de long, mais ils étaient heureux et en bonne santé. L’homme questionna Dieu, qui lui répondit : « Au Ciel, les baguettes sont très longues, mais chacun utilise ses propres baguettes pour nourrir celui qui est assis en face de lui… tandis qu’en enfer, ils ne peuvent arriver à manger, car chacun est préoccupé d’abord par le fait de se nourrir tout seul.
Cette courte histoire illustre parfaitement bien le sens de la vie et du bonheur : penser aussi à l’autre, vivre pour lui. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis » dira Jésus à ses disciples. Et Il n’a pas fait que de le dire, il est mort sur la Croix, en devenant le Sauveur de l’humanité, et en payant notre rachat de sa propre vie.
L’hédonisme, c’est l’inverse de tout cela. Je fais en sorte que les autres se sacrifient pour moi, sans jamais leur porter réellement secours ni me donner pour eux. Je cours après un but que je n’atteindrai jamais, car rien ni personne ne pourra vraiment me satisfaire fidèlement et totalement dans le temps.
Profiter des autres ou renoncer à moi-même
« Donnez, et Dieu vous donnera. On versera beaucoup de grains dans la grande poche de votre vêtement. Les grains seront bien secoués, serrés, ils déborderont ! En effet, Dieu vous donnera comme vous donnez aux autres ! » (Luc 6:38)[2]
Renoncer à moi-même, donner, me sacrifier pour procurer du bonheur aux autres : cela parait un peu paradoxal et va à contre-courant de l’idéal contemporain qui m’invite à satisfaire mes besoins en priorité, et à « profiter », mais cependant c’est ainsi que je deviendrai heureux moi-même. Et d’ailleurs, une telle joie jaillira dans mon monde intérieur, qu’alors je comprendrai pleinement le sens vrai du mot bonheur. Je deviendrai heureux « par ricochet ».
Et quand surviendra l’épreuve, la catastrophe sera moins importante. Je tomberai de moins haut, puisque l’important n’était pas d’abord mes acquis personnels mais ceux des autres. Je souffrirai, j’accuserai le coup, j’encaisserai le choc, mais le navire ne sombrera pas totalement, il résistera aux avaries malgré une importante voie d’eau.
Pour introduire ma réflexion sur l’épreuve, je désire que l’on réfléchisse d’abord à cela : tout dépend du sens que je donne à ma vie. Soit je vis exclusivement pour mon moi égoïste et superficiel, et je me plaindrai toujours, je ne serai jamais content et tout sera épreuve, soit je m’ouvre aux autres, en me tournant vers eux et en me sacrifiant pour leurs besoins.
Nous touchons de près l’une des raisons qui font que certains couples cassent facilement de nos jours. Après la lune de miel on découvre la réalité du vécu de l’autre : parfois un amour narcissique, tourné exclusivement vers le moi ; alors on en vient à prendre la décision de se séparer parce que la vie est devenue étouffante, insupportable, chacun étant parfois uniquement tourné vers sa propre personne et la satisfaction de son plaisir personnel.
On s’est marié, non pour rendre heureux l’autre, mais d’abord pour se rendre heureux soi-même, en puisant dans le conjoint un peu plus de contentement et de plaisir, que l’on veut rajouter au sien ; chacun tire la couverture à soi, et parallèlement, n’est surtout pas prêt à se sacrifier pour les besoins de l’autre.
Alors, le temps passe, engendrant de plus en plus de problèmes conjugaux[3], d’insatisfactions, de manques, et pour mieux nourrir et encourager le « moi » qui réclame encore plus de plaisir et de piment, on va chercher davantage de jouissance ailleurs, là où c’est toujours plus beau et plus merveilleux. On fuit, on se projette en avant à la recherche d’un bonheur illusoire et idéalisé. Et cela peut durer toute une vie sans jamais qu’on puisse le trouver !
Dominer, ou m’effacer
Lorsque Jésus est monté sur la Croix, Il a alors accompli l’acte le plus important de son ministère, ce pour quoi il était venu sur la terre : mourir et disparaître. Son but n’était pas de s’imposer et de se faire Roi, pas du tout, son but était de s’effacer, en servant ses disciples, et en mourant pour racheter et sauver l’humanité.
Lors de la scène du lavement des pieds, Jésus a bien confirmé aux disciples qu’ils devraient faire ainsi les uns envers les autres, sinon ils ne pourraient continuer à Le suivre[4]. Il leur a montré l’exemple le plus humiliant et le plus abaissant par rapport à Sa royauté et à Sa Seigneurie : Lui, le Roi des Rois, le Seigneur des Seigneurs, le voici qui met ses genoux à terre, accomplit la fonction d’un esclave, et lave les pieds nauséabonds des autres, des pieds couverts de crasse à cause de la route.
Il ne demande même pas à ses disciples de lui laver d’abord les pieds, Il insiste pour le faire tout seul aux autres. Il vit exclusivement pour le bonheur des siens : il montre une voie par excellence, celle de l’amour.
« Pierre dit à Jésus : Non, jamais tu ne me laveras les pieds. Jésus lui répondit: Si je ne te lave, tu n’auras point de part avec moi. » (Jean 13:8)Ainsi, toutes les fois où je recherche d’abord mon bonheur égoïstement, toutes les fois où je me sers en premier, toutes les fois où je me mets abusivement en avant en prenant le pouvoir, j’extorque aux autres un bonheur mal acquis. Les épreuves sont quelquefois là pour me rappeler à l’ordre et me faire réfléchir.
[1] hédonisme : (du grec hedonê, plaisir) : doctrine morale qui fait du plaisir le principe ou le but de la vie, avec une recherche du maximum de satisfaction par le minimum d’efforts.
[2] Bible « Parole de Vie »
[3] L’adjectif « conjugal » signifie « sous le même joug »
[4] « Pierre dit à Jésus : Non, jamais tu ne me laveras les pieds. Jésus lui répondit: Si je ne te lave, tu n’auras point de part avec moi. » (Jean 13:8)
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